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18 juil. 2015

Cancer du sein : vers une chirurgie à minima

Le cancer du sein peut se propager à d'autres organes (métastases du foie, du poumon, etc.) via la lymphe. Passage obligé de ce liquide, un certain nombre de ganglions axillaires peut être enlevé en même temps que l'opération de la tumeur. Ce curage axillaire peut néanmoins entraîner des séquelles douloureuses. Une nouvelle méthode moins traumatisante pourrait y remédier : la technique du ganglion sentinelle.
Cancer du sein et chirurgieL'envahissement des ganglions lymphatiques situés dans les aisselles représente la première étape vers le développement de métastases dans le cancer du sein. Il conditionne en grande partie le pronostic de ce cancer et son traitement.

Eviter la propagation du cancer

Si une tumeur opérée mesure moins d'un millimètre de diamètre et n'a pas encore envahi les ganglions, elle a neuf chances sur dix de guérir. Mais s'il existe déjà un envahissement ganglionnaire au moment du traitement, les chances de guérison ne sont plus que de 50 %.
Pour préserver au maximum les possibilités de survie, les ganglions atteints doivent être enlevés et le traitement complété par une chimiothérapie qui permettra de détruire les cellules tumorales disséminées dans l'organisme.
Jusqu'à une période très récente, l'ablation d'une tumeur invasive du sein (c'est-à-dire ayant commencé à infiltrer la glande mammaire) était donc systématiquement associée à un curage axillaire du côté atteint. Cette opération consiste en l'ablation d'une partie de la chaîne ganglionnaire située dans l'aisselle du côté du sein traité. Autrefois, la totalité des ganglions était enlevée. Aujourd'hui, une dizaine de ganglions sont enlevés et examinés.

Les inconvénients du curage

Parmi les conséquences du curage axillaire, on note l'atteinte du drainage lymphatique du sein et du bras, une augmentation de la sensibilité aux infections au niveau du bras. De plus, ce curage peut entraîner des douleurs et une certaine impotence du bras dans les semaines qui suivent l'intervention. L'aide d'un kinésithérapeute permettra de retrouver progressivement toute sa mobilité.
Au terme des trois à huit jours d'opération, un redon (petit tuyau servant à évacuer la lymphe) est laissé en place en dessous du bras. Malgré cela, le drainage de la lymphe se fait moins efficacement, ainsi un tiers des femmes a besoin d'une ponction suite à l'opération.
Enfin, 5 % des femmes doivent faire face après plusieurs années à un problème de "gros bras" ou lymphoedème du bras. Ce gonflement de la main et du bras très douloureux empoisonne la vie des patientes atteintes. Actuellement, on ne dispose d'aucun traitement réellement efficace face à ce problème.

Repérer les sentinelles

Développée depuis le début des années 1990, la technique du ganglion sentinelle est beaucoup moins traumatisante. Il s'agit de repérer les premiers ganglions de la chaîne axillaire, ceux qui seront les premiers à être envahis par les cellules malignes, et de les enlever pour les examiner. Un véritable curage ne sera effectué que s'ils sont atteints. 
En pratique, une substance radioactive légère et un colorant sont injectés autour de la tumeur, peu avant son ablation. Ces substances vont cheminer dans le système lymphatique et se concentrer dans les premiers ganglions qui drainent la tumeur, les ganglions sentinelles. Ce "marquage" permet au chirurgien de les repérer et de les enlever à travers une toute petite incision.
En moyenne deux ganglions sont prélevés et examinés aussitôt au laboratoire, au cours même de l'intervention. S'ils sont cancéreux, toute la chaîne ganglionnaire est enlevée. Dans le cas contraire, l'opération s'arrête là.
Mais une analyse plus approfondie sera réalisée dans les jours qui suivent. Certaines femmes pourront être à nouveau opérées pour un véritable curage, si les ganglions se révèlent finalement envahis. L'indication d'une chimiothérapie sera décidée selon plusieurs critères, parmi lesquels la présence ou l'absence d'envahissement ganglionnaire tient une place importante.

Plus d'une femme sur deux

La technique du ganglion sentinelle s'adresse à toutes les femmes ayant un cancer du sein de diamètre inférieur à 15 ou 20 mm, sans ganglion palpable dans l'aisselle, à condition que la tumeur soit unique et que la femme n'ait pas reçu de chimiothérapie dite néoadjuvante (chimiothérapie proposée dans certains cas, avant l'intervention pour diminuer la taille de la tumeur et augmenter les chances d'une chirurgie conservatrices).
"Dans notre expérience, cela représente plus de la moitié des patientes » estime le Dr Emmanuel Barranger (hôpital Tenon) "Mais cela concernera de plus en plus de femmes à mesure que le dépistage deviendra plus performant. La taille moyenne des tumeurs dépistées est actuellement de 15 mm".

Dans quelques centres seulement

Introduite en France il y a deux ou trois ans, cette technique n'est malheureusement réalisée que dans quelques centres anticancéreux. Elle a l'avantage d'éviter des curages axillaires inutiles dans 70 % des cas, car le risque d'envahissement ganglionnaire n'est que de 30 % dans ces petites tumeurs.
"Cela signifie pas de soins postopératoires (drains), moins de douleurs, tout un confort" souligne le Dr Barranger. L'hospitalisation est plus courte et le risque de séquelles minime. Néanmoins, 30 % des patientes devront avoir finalement un curage ganglionnaire :
  • Soit au cours de l'intervention, parce que l'examen immédiat était positif ou, plus rarement, parce que le ou les ganglions sentinelles n'ont pas pu être repérés ;
  • Soit lors d'une deuxième intervention, car l'examen plus approfondi des ganglions a montré la présence de cellules malignes.

Un certain nombre de "réinterventions"

La technique du ganglion sentinelle a aussi des inconvénients. Le premier est de devoir réopérer un certain nombre de patientes, là aussi sous anesthésie générale, pour un curage. Le deuxième est de courir le risque de laisser en place des ganglions métastatiques. La proportion de ces faux négatifs est de 3 à 5 %. "Mais le risque est étroitement lié à l'expérience du chirurgien, au nombre d'interventions qu'il réalise" observe le Dr Barranger.
Enfin, bien que le recul soit de dix ans environ aux Etats-Unis, on ne dispose pas encore d'études comparatives entre le curage axillaire systématique et la technique du ganglion sentinelle pour évaluer les effets de ces deux stratégies sur la survie à long terme. C'est seulement lorsque de telles études seront disponibles que l'on pourra juger véritablement des avantages de cette technique.
Source: ICI

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