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13 mai 2013

Pneumonie d'aspiration (Syndrome de Caplan)


Affection pulmonaire se caractérisant par un reflux de liquide dans les bronches à partir de l'estomac, entraînant une inflammation des bronches et des poumons due à la pénétration à l'intérieur des bronches de germes qui proviennent de l'oropharynx (partie du pharynx située en arrière de la cavité buccale) : par l'intermédiaire de la salive et du contenu de l'estomac.

Généralités 

La pneumonie est une affection des poumons due à un virus ou à une bactérie, et dont il existe plusieurs formes.

Classification 

On distingue plusieurs variétés de pneumonie par aspiration (que l'on appelle les formes cliniques) :
* La pneumonie acide appelée également syndrome de Mendelson est le résultat de l'inhalation de liquide provenant de l'estomac (suc gastrique) de nature acide. La pneumonie acide de Mendelson est source d'insuffisance respiratoire aiguë à cause de la présence d'oedème (accumulation de liquide dans les alvéoles pulmonaires).

* La pneumonie bactérienne qui correspond à l'inhalation du contenu de l'oropharynx. Cette variété de pneumonie, résultat d'une infection par des germes anaérobies (ne nécessitant pas d'oxygène pour se reproduire), se développe progressivement, entraînant de la toux, de l'hyperthermie (fièvre) et des crachats contenant du pus (purulents).


* Une troisième variété de pneumonie par aspiration se caractérise par l'obstruction des voies aériennes par les aliments contenus dans l'estomac et plus particulièrement ceux de nature végétale. Elle entraîne une dyspnée (difficulté respiratoire) pouvant passer pour de l'asthme et une cyanose (coloration tirant sur le violet de la peau et des muqueuse entre autres). Certains patients présentent également une insuffisance de la pompe cardiaque que les spécialistes nomment cardio-respiratoire progressive.
 

Physiopathologie 

La pneumonie par aspiration qui est aggravée par un terrain immunodéprimé (les capacités de défense de l'organisme sont diminuées) s'accompagne d'un œdème pulmonaire aigu (collection liquidienne à l'intérieur des alvéoles) susceptible d'entraîner la mort suite à une défaillance cardiaque (le cœur ne peut plus assurer sa fonction de pompe). D'autres organes, et plus particulièrement les poumons, se nécrosent (les tissus meurent faute de vascularisation). L'ensemble s'accompagne d'une surinfection microbienne.

Causes 

Cette affection est souvent consécutive à une anesthésie générale et peut survenir pendant ou après l'anesthésie.L'inhalation de salive, de liquide gastrique faisant suite à des vomissements ou après la survenue d'un traumatisme crânien ou d'un accident vasculaire cérébral est susceptible d'être la cause de pneumonie par aspiration.Certains processus morbides (cause de maladie) telle qu'un épisode d'intoxication par overdose (taux excessif de stupéfiant), un coma toxique ou une absorption massive d'alcool sont susceptibles d'entraîner ce type de pneumonie.Cette affection se voit également au cours de certains états cachectiques (accompagnés d'un dépérissement important) ou de certains comas.

Examen médical 

L'antibiogramme permet de mettre en évidence les germes (microbes) responsables.

Diagnostic differential 

Cette pathologie est quelquefois confondue, essentiellement en présence d'une obstruction des voies aériennes, avec l'asthme.

Traitement 

Il fait appel aux antibiotiques après avoir effectué un antibiogramme.L'amoxicilline est le plus souvent utilisé, surtout quand on suspecte une infection à germe anaérobie.D'autres antibiotiques comme la clindamycine ou encore l'amoxicilline associés au métronidazole sont également utilisés par certaines équipes spécialisées en pneumologie (spécialité médicale des maladies du poumon )
Le drainage postural effectué par un kinésithérapeute spécialisé en pathologie respiratoire est quelquefois nécessaire.On n'y associe le plus souvent une oxygénothérapie (utilisation de l'oxygène) et une ventilation assistée.

Nutrition entérale : sonde nasogastrique ou gastrostomie percutanée endoscopique


 
Lorsqu’une nutrition est indiquée pour prévenir ou traiter une dénutrition protéino-calorique, le choix entre une sonde nasogastrique (SNG) et une gastrostomie percutanée endoscopique (PEG) n’est pas toujours aisé. Chez les patients avec une atteinte neurologique et des troubles de la déglutition ou ceux avec une tumeur cervico-faciale, la PEG est associée à moins d’auto-extubations. En revanche, la morbidité inhérente à la pose de PEG est supérieure à celle liée à la SNG. Une méta-analyse montre que le risque d’interruption de la nutrition est plus faible pour la PEG, mais qu’il n’existe pas de différence en termes de survie ou de pneumonie d’aspiration entre PEG et SNG. De manière pragmatique, l’European Society for Clinical Nutrition and Metabolism recommande la PEG au-delà de trois semaines de nutrition entérale.

Pneumonie chez le patient ventilé: de la pathophysiologie à la prevention


La pneumonie nosocomiale est la seconde infection la plus fréquemment acquise à l’hôpital et elle représente en général 13 à 18% de toutes les infections nosocomiales. Elle est associée à un taux élevé de morbidité, de mortalité et augmente le coût de l’hospitalisation. Elle survient chez 0.6 à 1% de tous les patients admis à l’hôpital et chez 7 à 44% des patients ventilés en soins intensifs (SI). Elle prolonge l’hospitalisation de 7 à 10 jours en moyenne, est associée à une mortalité brute de 20-60% et à une mortalité attribuable (pourcentage de décès qui ne seraient pas survenus en l’absence d’une pneumonie) d’environ 30% (1). Dans les SI, la pneumonie représente une plus grande proportion des infections nosocomiales que dans le reste de l’hôpital (35-45% chez les patients ventilés). Même si la mortalité brute est élevée (40-80%), la mortalité attribuable chez les patients ventilés (27%) est semblable à celle retrouvée dans l’hôpital en général. La pneumonie nosocomiale est un facteur de risque de décès indépendant chez les patients des SI (tableau 1), même si certaines études récentes ont montré des résultats contradictoires.

Tableau 1: Variables indépendament associés au décès chez des patients de SI
Adapté de Fagon JAMA 1996; 275: 866
Adapté de Fagon JAMA 1996; 275: 866

Dans l’une de ces études, les facteurs prédictifs de mortalité ont été examinés dans deux populations de patients de SI: les patients ayant survécu et ceux qui étaient décédés. Une pneumonie nosocomiale était un facteur significativement associé à une augmentation de la mortalité, avec un odds ratio de 2.08, un résultat semblable à celui des bactériémies nosocomiales (JAMA 1996; 275: 866-9). Si l’on examine attentivement le taux de mortalité chez les patients ventilés, on voit que certains germes sont associés à des taux de mortalité plus élevés que d’autres. Par exemple, Pseudomonas spp. et Acinetobacter spp. peuvent être responsables de taux de mortalité supérieurs à 43% et même > 70%. De même, les pneumonies à légionnelles sont grévées d’une mortalité particulièrement importante. Une stratégie de prévention efficace des infections nosocomiales dans les SI peut réduire significativement la mortalité, mais pour évaluer des telles stratégies, il est essentiel de poser un diagnostic correct.

Diagnostic


Toutes les études, qu’elles concernent l’épidémiologie, la pathophysiologie, les facteurs de risque, le traitement, le pronostic et la prévention des pneumonies se heurtent au même problème: la difficulté de poser un diagnostic correct de pneumonie. Ce sujet a déjà fait l’object d’un article dans SWISS - NOSO (1994 ;1:5-6) et un article de consensus a récemment été publié (1). Le plus souvent, ce sont les critères cliniques qui sont utilisés pour diagnostiquer une pneumonie nosocomiale: fièvre, infiltrat pulmonaire nouveau ou progressif sur un cliché thoracique, leucocytose, sécrétions bronchiques purulentes, culture positive pour un pathogène potentiel. La fièvre et l’infiltrat ne sont toutefois pas spécifiques pour une pneumonie, et dans le cas particulier des patients ventilés mécaniquement, plusieurs autres alternatives sont à prendre en considération (fibrose, embolie, atélectasie, insuffisance cardiaque). La biopsie pulmonaire avec histologie et culture est considérée comme le «gold standard» pour le diagnostic de pneumonie. Pratiquement, une telle approche n’est envisageable (et nécessaire) que chez une extrême minorité des patients.
Des méthodes moins invasives ont été développées. Les plus importantes sont citées dans la tableau 2 (2). Il faut garder à l’esprit que la sensibilité et la spécificité d’une méthode sont toujours déterminées en fonction d’une autre méthode présentant elle-même des avantages et des inconvénients. Des seuils ont été fixés sur la base de différentes études, dans lesquelles la sensibilité et la spécificité variaient en fonction des critères pris en considération. Les résultats récents d’une méta-analyse suggèrent que l’utilisation d’un seuil prédéterminé de concentration des bactéries pour les échantillons de brosse protégée (BP) ou de lavage broncho-alvéolaire (LBA) ne serait pas appropriée dans toutes les situations cliniques et que la prise en compte de la probabilité clinique d’une pneumonie dans l’évaluation pourrait améliorer significativement la sensibilité et la spécificité de ces tests. Dans la tableau 2, on peut voir qu’un diagnostic correct ne peut être posé de manière indiscutable avec aucune de ces méthodes. Il faut cependant réaliser que le diagnostic de pneumonie est fréquement évoqué chez les patients ventilés et qu’il est difficilement envisageable de recourir à chaque fois à une méthode «invasive» pour des raisons pratiques et de coût. Il est donc fréquent qu’une antibiothérapie soit instaurée sans ce type d’examens. Des études récentes ont montré que l’analyse quantitative des aspirations endotrachéales semble avoir une valeur diagnostique raisonnable et offre donc une alternative aux méthodes plus invasives. Les investigations devaient toujours être faites avant l’introduction ou le changement de l’antibiothérapie. Si cela est possible, l’antibiothérapie peut être stoppée pendant 48 heures avant de procéder à une BP ou un LBA.

Tableau 2: Valeur des différentes méthodes pour le diagnostic microbiologique chez les patients ventilés avec une pneumonie clinique et radiologique
 
Adapté de Clinical Microbiology and Infection 1997; 3: 561
Adapté de Clinical Microbiology and Infection 1997; 3: 561

En résumé, malgré l’amélioration des méthodes diagnostiques, un diagnostic correct n’est pas posé dans tous les cas de pneumonie. Le sous-diagnostic comme le sur-diagnostic sont tous les deux associés à des problèmes. Une bonne communication entre tous les partenaires (cliniciens, microbiologues etc.) est nécessaire pour assurer un diagnostic optimal. Relevons encore que les cultures de «surveillance» des sécrétions bronchiques ne sont pas recommandées (3).

Tableau 3: Microorganismes responsables de pneumonies chez les patients ventilés

  • * Chez les patients avec facteurs de risque
  • ** Y compris le S.aureus résistant à la meticiline




Figure 1: Modes d'acquisition de la pneumonie chez les patients ventilés


Les épisodes survenant dans les premiers jours après l’intubation (pneumonie précoce: 4 jours ont été arbitrairement proposés comme base) sont presque toujours causés par la flore oropharyngée normale. Si certains facteurs sont présents, tels une antibiothérapie antérieure, une hospitalisation prolongée ou des particularités spécifiques à l’hôte, le spectre des microorganismes peut être différents, avec des sensibilités aux antibiotiques différentes et cela a de grandes implications diagnostiques et thérapeutiques. Les épisodes survenant plus de 4 jours après l’intubation (pneumonie tardive) sont presque toujours causés par les bacilles à Gram négatif ou par des S. aureus. D’autres microorganismes peuvent également être en cause, tels les anaérobes (pneumonie par aspiration), les légionnelles, des virus (Influenza, virus respiratoire syncitial) ou des champignons (par exemple Aspergillus sp chez des patients neutropéniques).
Les microorganismes qui colonisent la trachée et le poumon viennent rarement par voie hématogène, mais proviennent principalement de la flore oro-pharyngée ou du tractus digestif. Le développement d’une infection des voies respiratoires va dépendre du nombre et de la virulence des microorganismes d’une part et de l’efficacité des mécanismes de défenses humorales et cellulaires du poumon d’autre part. Peu après leur admission en SI, les patients sont colonisés par des bacilles à Gram-négatif au niveau de l’oropharynx. Ceci est associé à un risque élevé de pneumonies comparé aux patients non colonisés. C’est ainsi que dans une étude portant sur 213 patients de SI, 23% des patients avec une colonisation oropharyngée développèrent une pneumonie nosocomiale mais seulement 3,3% des patients non colonisés (2). Bien sûr, d’autres facteurs de risques contribuent au développement d’une pneumonie et ils seront discutés plus loin.
L’origine de la colonisation de l’oropharynx par les bacilles à Gram négatif n’est pas établie avec précision, mais il semble que l’une des causes importante soit le stress induisant la sécrétion d’enzymes qui altèrent les récepteurs de surface des cellules oropharyngées. Cette altération facilite l’adhérence de bacilles à Gram négatif. Ainsi une brève exposition de cellules épithéliales buccales à de la trypsine a augmenté de 10 fois l’adhérence de Pseudomonas aeruginosa par rapport à des cellules de patients non colonisés.
Les germes qui colonisent l’oropharynx des patients ventilés sont souvent retrouvés ultérieurement dans la trachée, à la suite de microaspirations. Une étude a montré que si l’on applique un colorant (bleu d’Evans) au niveau de la langue, celui-ci est détecté plus tard dans l’aspiration trachéale, malgré l’obstruction de la trachée par le tube endotrachéal. Ceci a été noté chez 56% des patients avec un ballonnet à haute pression et chez 20% des patients avec un ballonnet à basse pression. Le délai moyen entre l’instillation du bleu d’Evans et la première aspiration positive était de 14 heures.
Chez les patients ventilés, il peut y avoir une accumulation de sécrétions dans la région sus-glottique, au dessus du ballonnet. Ceci constituerait un réservoir de bactéries et pourrait augmenter le risque de colonisation par microaspiration.
Des études ont montré la présence d’un biofilm sur la surface des tubes trachéaux. Dans une étude, 73% des tubes contenaient des biofilms positifs pour des bactéries et 29% étaient positifs pour des bacilles à Gram négatif aérobies, avec un nombre élevé de bactéries (jusqu’à 105 cfu/ml). En examinant plus attentivement les tubes, on pouvait voir des «craquelures» qui constituaient des réservoirs idéaux pour des bactéries. Les bactéries pourraient se détacher par intermittence, entraînant ainsi l’arrivée d’un inoculum important au niveau de la trachée, et pouvant potentiellement déclencher un épisode de pneumonie. Cependant, le rôle exact de ces observations n’est pas encore clair (J. Clin. Microbiol. 1989; 27: 2014)

Une étude a été effectuée auprès de 24 patients, 13 sous ventilation mécanique et 11 sous ventilation spontanée, chez qui un marqueur radioactif (technetium-99) était instillé dans l’estomac par une sonde nasogastrique. Deux heures après, des rayons gamma étaient enregistrés dans l’oesophage et l’aspiration bronchique. Les rayons étaient détectés dans l’oesophage chez 69% des patients sous ventilation mécanique et 91% des patients sous ventilation spontanée; et dans l’aspiration trachéale, ils étaient détectés chez 38% des patients sous ventilation mécanique et 45% des patients sous ventilation spontanée. Au point de vue bactériologique, des études ont montré des pourcentages de colonisation trachéale rétrograde à partir de l’estomac et variant de 3 à 38% (2). Ces pourcentages représentent des pourcentages minimaux, basés sur la démonstration d’une séquence dans le temps entre l’isolement du même microorganisme dans l’estomac et, plus tard, dans la trachée.
Dans une étude, des échantillons séquentiels étaient prélevés dans l’estomac et la trachée de patients intubés. Le temps entre les deux prélèvements était noté. Dans certains cas, les germes apparaissaient simultanément dans les deux sites, mais dans plus de 50% des cas, le germe isolé dans l’estomac apparaissait (jusqu’à 16 jours) avant que le même germe soit isolé au niveau de la trachée, suggérant qu’il provenait de l’estomac. L’analyse de la bilirubine suggérait même que la provenance probable des bactéries était le duodénum (Lancet 1993; 341: 911-3). Dans une autre étude réalisée à Lausanne, 19/29 épisodes de pneumonie d’apparition tardive étaient dus à des bacilles Gram négatif, dont 16 (84%) avaient une colonisation gastrique avec la même bactérie démontré par typage moléculaire avant le développement de la pneumonie.(Ann. Int. Med 1994; 120: 653). A l’exception de 2 patients, tous avaient des germes différents. Ces données suggèrent que des infections croisées n’étaient pas fréquentes pendant la période d’étude et que les bactéries à l’origine de l’infection provenaient d’avantage de la flore endogène des patients.
L’estomac a normalement un pH hautement acide, mais le pH peut être augmenté à la fois par les médicaments et «l’insuffisance exocrine» qui apparaît souvent chez les patients ventilés. Dès que le pH de l’estomac dépasse 4, la prolifération des bactéries est possible, spécialement celle des bacilles à Gram négatif. Dans une étude classique, il a été montré que les patients recevant un traitement prophylactique contre l’ulcère de stress qui ne modifie pas le pH de l’estomac étaient moins souvent colonisés au niveau de l’estomac que ceux qui avaient été traités par des antiacides ou des anti-H2 (N. Engl. J. Med. 1987; 317: 1376).

La plupart mais pas toutes les études qui ont examiné sur le rôle des différents régimes prophylactiques de l’ulcère de stress a montré que les traitements qui augmentent le pH gastrique étaient associés à une augmentation du risque de pneumonie (figure 2). Cette discordance est probablement due aux différentes populations de patients (par exemple, quelques études avaient inclus des patients ventilés et des patients non ventilés), à la taille insuffisante des groupes de patients, ou d’autres problèmes méthodologiques. En dépit des nombreuses études qui ont examinés le rôle des différents régimes prophylactiques contre l’ulcère de stress, des controverses persistent. Dans une large méta-analyse, le sucralfate était associée à une incidence plus basse de pneumonies nosocomiales comparé aux antacides et aux antiH2 (Odd Ratio [OR] 0.80, Confidence Interval [CI] 0.56-1.15) (JAMA 1996; 275: 308-14). L’étude lausannoise suggère qu’il convient de différencier entre pneumonie précoce (< 4 jours après intubation, flore d’origine oropharyngée) et une pneumonie tardive (> 4 jours après intubation, bacilles à Gram négatif) : le sucralfate n’avait un effet « protecteur » que pour les pneumonies tardives (Ann. Int. Med. 1994; 120: 653-62)

Figure 2: Résumé des études sur l'incidence des pneumonies nosocomiales chez les patients ventilés randomisés pour différentes prophylaxies contre l'ulcère de stress
 


La décontamination digestive sélective (DDS) est une mesure préventive controversée. Elle comprend l’utilisation d’antibiotiques par voies orale, digestive et souvent systémique pour éliminer tous les germes pathogènes potentiels des voies respiratoires supérieures et du tractus gastro-intestinal. L’utilisation de la DDS réduit l’incidence des pneumonies, comme l’a montré une méta-analyse du «Selective Decontamination of the Digestive Tract Trialists’ Collaborative Group» portant sur 22 études contrôlées, randomisées, évaluant approximativement 4000 patients (Br. Med. J. 1993; 307: 525). D’après cette étude, malgré la réduction significative de l’incidence des pneumonies et des infections des voies respiratoires observée chez les patients traités (OR 0.37 [95%] CI 0.31-0.43), la valeur de l’odds ratio pour la mortalité globale (OR 0.9 [95%] CI 0.79-1.04) suggérait au mieux un effet modéré du traitement. De meilleurs résultats dans la réduction de la mortalité étaient observés seulement si on prenait les groupes comparant une DDS topique associée à un traitement antibiotique systémique précoce avec un placebo (OR 0.80 [95%] CI 0.67-0.97).Vue les grandes variations dans le «case mix» et dans les protocoles de DDS, aucune conclusion ferme ne peut-être tirée concernant les effets de la DDS sur la mortalité des patients ventilés.
Le problème majeur de la DDS est le risque potentiel de sélection les germes résistants aux antibiotiques. D’autres investigations sont nécessaires pour mieux identifier les patients auxquels ce type de traitement peut être appliqué.

Les facteurs de risque et les principes de prévention sont résumés dans le tableau 4 (2). De plus les recommandations détaillées pour la prévention des pneumonies selon les Center for Disease control and Prévention (Atlanta, USA) sont présentés dans le tableau 5 (recommandations pour le patient ventilé seulement), et catégorisées selon le niveau d’évidence justifiant chaque recommandation (3).
Tableau 4: Facteurs de risque et principes de prévention chez le patient ventilé
 
Certains facteurs de risque, comme l’âge (>60 ans), une maladie pulmonaire sous-jacente, des insuffisances d’organe, un coma, une bronchoaspiration, un tabagisme, un diabète, une hypotension, un alcoolisme, une maladie du système nerveux central, une bronchopneumopathie obstructive, une insuffisance rénale et insuffisance respiratoire sont des facteurs propres au patient et sont donc difficiles à modifier. D’autres facteurs de risque dépendent de la prescription de certains médicaments. La prophylaxie de l’ulcère de stress a été mentionnée, mais l’utilisation de certains autres médicaments est aussi un facteur de risque. Les sédatifs, les corticostéroïdes et les produits cytostatiques peuvent altérer les défenses de l’hôte. La prophylaxie ou les traitements antibiotiques donnés avant un épisode de pneumonie peuvent sélectionner des bactéries résistantes, et ainsi réduire les options thérapeutiques. L’administration endotrachéale prophylactique de gentamicine s’est révélée inefficace dans la prévention des pneumonies, et elle était associée à l’apparition de bactéries résistantes à la gentamicine.




Tableau 5 Recommandations pour la prévention des infections nosocomiales pulmonaires chez les patients ventilés, adaptées des CDC par le comité de Swiss-NOSO.


Deux études ont suggéré que l’élimination des sécrétions sus-glottiques en utilisant soit un tube endotrachéal spécial soit un cathéter, pouvait réduire le risque de pneumonie. Dans l’étude de Valles et al, les patients avec une aspiration sus-glottique continue ont développé moins de pneumonies que ceux sans aspiration sus-glottique. Le taux d’incidence était de 19.9 épisodes/1000 jours de ventilation chez les patients sous aspiration continue et de 39.6 épisodes/1000 jours de ventilation dans le groupe contrôle. La différence était due à une réduction significative du nombre d’infection causée par des cocci à Gram positif et par H. influenzae chez ceux sous aspiration continue (p<0.03) (Ann. Int. Med 1995; 122: 179). De tels tubes ont été mis sur le marché. Cependant, ces tubes ont leurs propres problèmes, comme la contamination et l’obstruction de la lumière.

On recommande que les tubes endotrachéaux et les sondes gastriques soient introduits de préférence par voie orale plutôt que nasale. Rouby et al ont montré que l’incidence des sinusites était liée à la mise en place nasale des tubes et une pneumonie nosocomiale apparaissait plus fréquemment chez les patients avec sinusites maxillaires (67%) que chez ceux qui n’en avaient pas (43%) (p=0.002). Ces résultats ont été confirmés par une autre étude (2).
Une mesure simple pour prévenir partiellement le reflux oesophagien est de mettre le patient en position semi-assise; il a été démontré que cela diminuait la fréquence avec laquelle les mêmes germes étaient retrouvés dans l’estomac, le pharynx et la trachée (32%), par rapport à la position couchée (68%) (Ann. Intern. Med 1992; 116: 540-3). Cependant cela n’est pas réalisable pour tous les patients ventilés.
L’incidence des pneumonies est augmentée par des manipulations fréquentes du circuit de ventilation et il est actuellement recommandé de ne le changer que toutes les 72 heures ou plus. Certaines études récentes suggèrent même qu’un changement peut être effectué après 7 jours seulement. La condensation dans les tubes peut être un réservoir de germes pathogènes, d’où la nécessité d’un bon drainage; les filtres distaux permettent d’éviter les problème de condensation et peuvent prévenir la colonisation, permettant ainsi une utilisation du même circuit pour une période plus longue.
Beaucoup d’agents pathogènes, comme P. aeruginosa et S. aureus, survivent bien dans l’environnement. Par conséquent, la manipulation des appareils et des équipements devra être réduite au minimum. Les techniques aseptiques et de bonnes mesures d’hygiène, (lavage fréquent des mains ou port de gants pour le personnel, isolement des patients porteurs des germes multirésistants, désinfection adéquate du matériel), permettent de diminuer les contaminations à partir d’autres patients ou de l’environnement.

Références

  1. American Thoracic Society. Hospital-acquired pneumonia in adults : Diagnosis, assessment of severity, initial antimicrobial therapy and preventatives strategies. Am. J. Respir. Crit. Care Med 1995; 153: 1711-25
  2. Francioli P., Chastre J., Langer M et al. Ventilator-associated pneumonia. Understanding epidemiology and pathogenesis to guide prevention and empiric therapy. Clin. Microbiol. and Inf. 1997; 3 ( Suppl 1): S 61-S 76
  3. Centers for disease control and prevention. Guidelines for prevention of nosocomial pneumonia. MMWR 1997; 46, RR-1: 45-77
  4. Swissnosoco




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