Résumé
Introduction
Test
La thromboplastine utilisée dans le TP est constituée d’une protéine transmembranaire, le facteur tissulaire, et de phospholipides. Elle est extraite principalement de cerveau (lapin, bœuf) ou de placenta humain et elle est ensuite enrichie en phospholipides et en calcium. Le facteur tissulaire est également disponible sous forme de protéine recombinante (humaine ou animale).
La thromboplastine ajoutée au plasma (citraté pour chélater une grande partie du calcium) va se lier au facteur VII (ainsi qu’aux traces de facteur VII activé, FVIIa). Le complexe ainsi formé va activer le facteur X en facteur Xa. Le FXa a deux fonctions principales : d’une part il active le facteur VII en FVIIa, ce qui va augmenter la quantité de FXa présente par rétroaction positive et d’autre part il active la prothrombine en thrombine. L’activation de la prothrombine se fait par l’intermédiaire d’un complexe, appelé prothrombinase, comprenant le FXa, les phospholipides et le calcium apportés par le réactif de thromboplastine ainsi qu’un cofacteur sans activité enzymatique, le facteur V. La thrombine ainsi générée transforme le fibrinogène en fibrine (figure 1). Le temps de coagulation est le délai qui s’écoule entre l’adjonction de la thromboplastine et la formation du caillot. Il est en général de l’ordre de 10 à 11 secondes chez les sujets normaux.
Figure 1
Schéma illustrant les différentes réactions de la voie extrinsèque de la coagulation
PL : phospholipides ; Ca++ : calcium ionisé.
PL : phospholipides ; Ca++ : calcium ionisé.
Expression des résultats du temps de prothrombine
L’expression des résultats du TP varie en fonction des régions. Dans les pays anglo-saxons, le TP est exprimé généralement en secondes, correspondant au temps de coagulation du patient ou dans le rapport [temps de coagulation du patient/temps de coagulation du plasma de référence]. Dans la plupart des pays européens, le résultat du TP est exprimé en pour cent : le temps de coagulation obtenu est rapporté sur une courbe de calibration obtenue en diluant le plasma de référence (proche de 100%) et en mesurant le temps de coagulation de ces dilutions. Une approche introduite récemment consiste à établir cette courbe de calibration à partir d’un set de plasmas calibrés en pour cent par le fabricant de la thromboplastine. Les deux méthodes présentent des inconvénients. Vu la diversité des thromboplastines présentes sur le marché et leurs différences (origine de l’espèce, extraites ou recombinantes, composition des phospholipides, force ionique, etc.), les thromboplastines présentent des sensibilités différentes aux déficiences factorielles et aux facteurs partiellement décarboxylés induits par l’ingestion d’antivitamine K.1 De ce fait, pour un même patient et un même plasma de référence, les temps de coagulation obtenus avec différentes thromboplastines vont varier. La méthode en pour cent est également sujette aux contraintes exposées ci-dessus. De plus, elle introduit un biais supplémentaire dans la mesure où dans la courbe de calibration tous les facteurs, ainsi que le fibrinogène, sont dilués d’un même taux alors que ce n’est en général pas le cas chez les patients. Dès lors, pour toutes les raisons exposées ci-dessus, les résultats obtenus avec différents réactifs ne sont pas semblables quel que soit leur mode d’expression.
International normalized ratio (INR)
Malgré les limites de cette harmonisation, l’INR représente un progrès majeur.
Temps de prothrombine et déficits en facteurs
En l’absence de traitement par les antivitamines K, un allongement du TP indique un déficit acquis3,4 ou héréditaire dans un ou plusieurs facteurs de la voie extrinsèque (FV, FVII, FX, prothrombine) ou un taux de fibrinogène inférieur à 0,8 g/l. Pour les raisons décrites plus haut, le retentissement de ce(s) déficit(s) sur le temps de coagulation est fonction de la thromboplastine utilisée. Une étude récente a montré que la concentration relative en phosphatidylsérine dans le mélange utilisé pour la recalcification du facteur tissulaire jouait un rôle important dans la sensibilité aux déficits factoriels, particulièrement pour la prothrombine et le facteur VII.5 Des thromboplastines ayant un ISI similaire peuvent différer dans la sensibilité aux déficits factoriels.
Utilisation dutemps de prothrombine dans les scores cliniques
L’utilisation du TP dans les scores cliniques se heurte aux problèmes déjà discutés plus haut : les différents modes d’expression du résultat et la sensibilité des thromboplastines aux déficits en facteurs. Dans la formule originale du score MELD (Model for End-Stage Liver Disease), le résultat du TP était introduit en secondes. Plusieurs groupes ont cherché à déterminer quel mode d’expression (secondes, rapport patient/référence, pour cent, INR) pouvait atténuer les différences de sensibilité entre les thromboplastines. Une étude française parue en 1998 montrait que le pour cent était la solution la moins mauvaise.6 L’INR n’est pas applicable dans ce cas particulier car les déficits induits par les antivitamines K sont très différents de ceux rencontrés dans les atteintes hépatiques. En particulier, le taux de facteur V est très élevé chez les patients sous antivitamine K alors que dans les atteintes hépatiques il peut être très bas. En outre, les facteurs partiellement carboxylés et non carboxylés affectent de façon diverse les thromboplastines en fonction de leur origine. Deux études récentes, parues dans le même numéro d’Hepatology, ont abordé le problème par une voie novatrice, calquée sur le modèle théorique de l’INR.7,8 A l’aide de plasmas de patients présentant une atteinte hépatique, de plasmas d’individus sains et des thromboplastines de référence de l’OMS, un ISI « hépatique » (ISIMELD) a été déterminé pour une dizaine de thromboplastines commerciales. A l’aide de celui-ci, il est désormais possible de calculer un INRMELD et d’utiliser la formule du score avec toutes ces thromboplastines. Il est souhaitable que les fabricants de thromboplastines fournissent un ISIMELD en même temps qu’un ISIAVK. Il est intéressant de noter que pour les thromboplastines d’origine humaine, recombinantes ou non, les valeurs des deux ISI sont très proches (tableau 1).
Tableau 1
Comparaison entre les valeurs d’ISI obtenues par calibration contre la thromboplastine internationale de référence avec des patients sous traitement par antivitamines K (AVK) et des patients avec insuffisance hépatique (MELD)
Comparaison entre les valeurs d’ISI obtenues par calibration contre la thromboplastine internationale de référence avec des patients sous traitement par antivitamines K (AVK) et des patients avec insuffisance hépatique (MELD)
Variables préanalytiques entre le prélèvement et le laboratoire
Les prélèvements sanguins destinés aux tests d’hémostase doivent être anticoagulés avec une solution de citrate de sodium dans un rapport de 1 à 9. La chélation du calcium par le citrate empêche la coagulation de se produire parce que cet ion est indispensable à certaines réactions enzymatiques aboutissant à la formation de la thrombine. L’EDTA ou l’oxalate ne sont pas utilisables parce que la concentration résiduelle en calcium est trop faible pour garantir la stabilité des facteurs V et VIII. Dans le commerce, on trouve des tubes de prélèvement contenant deux concentrations différentes de citrate, 0,109 ou 0,129 mol/l. L’International Society on Thrombosis and Haemostasis recommande l’utilisation du citrate 0,109 mol/l.9 Certaines études ont montré que les échantillons prélevés avec du citrate 0,129 mol/l avaient des INR plus élevés que ceux prélevés avec du citrate 0,109 mol/l avec certaines thromboplastines. La concentration en citrate peut donc avoir une influence sur la valeur de l’ISI.
Les tubes de prélèvement doivent être remplis complètement, avec une tolérance de -10%. Les réactifs utilisés pour les tests d’hémostase contiennent du calcium afin d’antagoniser l’effet du citrate. Lorsque le tube est mal rempli, la concentration du citrate dans le plasma est trop grande par rapport au calcium ajouté par les réactifs. Ce manque de calcium induit un prolongement des temps de coagulation. De plus, le rapport (volume de citrate/volume de plasma) n’est pas respecté, ce qui induit une dilution trop importante du plasma. Pour ces deux raisons, il convient également d’adapter le volume de citrate dès que la valeur de l’hématocrite est égale ou supérieure à 55%.
Le délai entre le prélèvement et la réalisation du test est un élément important. Le facteur V étant labile, ce délai ne doit pas dépasser quatre heures, l’échantillon devant être conservé à température ambiante afin d’éviter l’activation du facteur VII au froid. Ce délai peut être porté à huit heures pour les patients sous anticoagulation orale dans l’intervalle thérapeutique : chez ces patients le taux de facteur V est généralement supérieur à 100% et les éléments qui déterminent le temps de coagulation sont les taux de facteurs VII, X et la prothrombine.
Conclusion
Le temps de prothrombine demeure le test d’hémostase le plus pratiqué. Les réactifs de thromboplastine ont évolué en fonction des connaissances accumulées sur la structure et les fonctions du facteur tissulaire. Il subsiste cependant le problème de la grande diversité des thromboplastines disponibles dans le commerce et l’absence d’une méthode uniforme d’expression des résultats. Il faut souligner les grands efforts d’harmonisation qui ont conduit à l’établissement de l’INR et à sa généralisation à travers le monde. Il est à souhaiter que la variante hépatique de l’ISI connaisse le même développement.
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